mercredi 26 janvier 2011

Sur la plage de Chesil

Entre Edward et Florence, rien n'allait vite. Les avancées importantes, la permission qu'elle lui donnait en silence d'aller plus loin dans ce qu'il avait le droit  de voir ou de caresser, ne s'obtenaient que graduellement. Le jour d'octobre où il entrevit pour la première fois ses seins nus précéda de plusieurs semaines le moment où il put les toucher - le 19 décembre. Il les embrassa en février, mais pas les pointes, que ses lèvres n'effleurèrent qu'une seule fois, en mai. Elle-même ne s'autorisait à explorer son corps à lui qu'avec une prudence plus grande encore.



Extrait du délicieux roman Sur la plage de Chesil, Ian McEwan (page 31 Folio poche n°5007).

vendredi 21 janvier 2011

VDM


Aujourd'hui, pendant la leçon de trompette de mon fils, je lisais le dernier numéro des Inrocks au fond de la salle, et j'étais ravie parce que François Hollande, qui en fait la couverture, est mon chouchou pour les prochaines présidentielles, et l'article qui lui était consacré m'a confortée dans cet état d'esprit. J'ai vraiment commencé à y croire. (c'était pas forcément fait pour, mais voilà!)


C'est donc souriante et d'humeur joyeusement conquérante que je m'avance vers Poldi (un diminutif de Leopold). En effet, le professeur de mon fils vient de m'inviter à les rejoindre pour m'expliquer dans mon anglais approximatif (il est roumain, et parle parfaitement allemand et anglais, contrairement à moi) que mon fils jouera le premier mouvement de la sonate n°1 de Hook pour son prochain concert, qui aura lieu fin mars ou début avril; il a donc deux mois pour apprendre par coeur le morceau et le public sera ébloui par lui. 
Je traduis à mon fils qui me répond (après quelques secondes de réflexion qui nous ont mis, son professeur et moi, en alerte) que j'ai une grosse crotte de nez collée sur le bout du nez. 
VDM, comme disent les jeunes.

Dans la vie, je suis à fond pour les non-dits, on s'en remet beaucoup plus facilement.

mardi 18 janvier 2011

jeudi 13 janvier 2011

Le cru et le cuit #5

Le cru

Wien,  décembre 2010

Rentrer de voyage et déjà préparer le suivant.
S'imaginer à la faveur d'un rayon de soleil que le printemps est de retour.
Oublier le temps de chien en Bretagne l'été dernier et avoir envie d'y retourner l'été prochain.
Avoir des associations d'idées bien chouettes.

Le cuit

du gloss

Se raisonner pour la Bretagne, envisager la Corse.
S'asseoir sur un repose-pieds parce que le chat est sur le fauteuil.
Ne pas laver les cheveux par paresse au détriment de l'hygiène la plus élémentaire.
Rayer et cabosser la nouvelle voiture (qui vaut un deux bras) en se cognant à un poteau du parking.
Décider de reprendre son corps en main, mais seulement après le gigot.

Mettre du gloss.
Avoir des cheveux qui se collent dans le gloss. 

vendredi 7 janvier 2011

Pédiatrie vs gériatrie

Les urgences pédiatriques après les funérailles, ça requinque.

("je me dis des douleurs pour plus tard", Picasso devant Le déjeuner sur l'herbe de Manet)

Le service de pédiatrie en quelques mots: Super Picsou Géant n°161, perfusion, haricot pour vomir, maman tu vois pas que je suis malade, pleurs, râles, gémissement, salle de jeux, infirmier douteux, machine à café, Mickey Parade, eau glacée, interne fier de son savoir (alors il faut savoir, et que vous compreniez bien, qu'il vomit pour plusieurs raisons: petit un la douleur, petit deux l'irritation, petit trois...), mais maman laisse-moi, maman reste, gémissements, infirmière revêche mais marrante, enfant exaspérant, enfant vraiment très exaspérant, pleurnichant et crachant du sang, câlin. Partir et le laisser tout seul.

Le service de gériatrie en quelques mots: râles, gémissements, dents dans un verre, poignets attachés, tuyaux dans le nez, pleurs, quelques rires, internes adolescents, odeur de sueur rance mêlée d'urine, matelas d'eau pour éviter les escarres, pleurs, masques à oxygène, câlins, baisers mouillés de larmes, infirmière lucide (on peut vous appeler dans la nuit s'il se passe quelque chose? et bon courage), interne idiot (madame? MADAME? vous savez quel jour on est?), yeux vitreux, et pour finir doucement, un médecin qui parle de morphine. Partir et la laisser toute seule.


mardi 4 janvier 2011

Jehanne la Pucelle #6 Gentil Dauphin, j'ai nom Jehanne la Pucelle



- Je ne me suis pas déplacée depuis les confins du royaume pour me baffrer de cailles au jus, Monsieur.


Et délaissant le buffet pourtant coquettement achalandé, elle s'approcha d'un groupe d'hommes tous plus richement vêtus les uns que les autres, choisit le plus laid d'entre eux, s'agenouilla devant lui et sur un ton grandiose, à faire pâlir Victor Hugo, lui dit ceci:

-Je vous mènerai, gentil dauphin, à Rome, pour vous faire oindre et couronner!
- Ah.

- Je pensais quand même que ça déclencherait un peu plus d'enthousiasme!


- Certes. Mais maintenant que j'y pense, comment as-tu deviné que je suis le dauphin?

-J'ai été guidée par un ange vers vous, et je vous mènerai, gentil dauphin, à Rome, pour vous faire oindre et...

- Oui oui, j'ai compris. Mais vois-tu, joliette, je suis un homme simple, et Reims me suffira.

- C'est vous qui voyez, gentil dauphin.

- Certes. Et comment t'appelle-t-on, dans ta contrée? Je soupçonne un accent lorrain, n'est-il pas*?

- Gentil dauphin, j'ai nom Jehanne La Pucelle, et je suis à votre service pour sauver votre royaume, libérer Orléans, et Paris, et vous faire oindre et...

- Pucelle, dis-tu? Quel nom étrange et curieusement évocateur...




(à suivre)


*formulation d'influence anglaise, notable à cette époque. Et d'ailleurs c'est pour ça qu'il y avait la guerre.

lundi 3 janvier 2011

Souvenirs souvenirs

En novembre dernier, après de longues semaines de torture, j'ai enfin fini le roman le plus insupportable que j'aie eu à lire ce dix dernières années.  Je m'étais pourtant juré de savourer chaque mot avec des paillettes plein les yeux. Voici comment.

Un mercredi de cet été, dans un petit bar du Trastevere, un exquis quartier de Rome, vraiment romain, s'entend, nous nous arrêtâmes on s'était arrêté en urgence parce que Léonard* avait une affaire importante à régler (quand on a des enfants, les voyages, c'est pas franchement délicat) (par exemple Joyeuse*, elle, est tombée par chahut dans une fontaine du jardin de la Villa Giulia, trempée jusqu'aux os, il a fallu acheter un tee-shirt étrusque taille 8 ans à la boutique pour lui servir de robe pour le reste de la journée, et c'est donc ainsi vêtue qu'elle a visité la Galleria Borghese, un lieu qui mérite le détour).

Dans ce café, la serveuse qui ressemblait à Dani mais en mieux conservée et nous a servi de délicieusement fraîches bières italiennes. 






Les autres clients étaient tous des personnes seules, lisant un journal, un magazine, s'affairant sur un ordinateur portable, mangeant de petits sandwichs grillés.
Dans ce café, pendant qu'on se demandait ce que pouvait bien fabriquer Léonard* qui ne revenait décidément pas alors qu'on lui avait prescrit de  vraiment se dépêcher, pour une fois, on a regardé quel genre de bouquins traînaient sur la bibliothèque à côté de notre table et on y a trouvé un roman français, abondamment surligné de fluo jaune jusqu'à la page 34.

Du coup, une fois en France,  j'ai acheté le dit roman comme pour revivre ces délicieux souvenirs romains (ici, les paillettes plein les yeux).  

J'ai surtout compris pourquoi un francophone de bonne volonté avait décidé que la vie à Rome ne méritait pas de s'ennuyer avec l'anti-héros le plus détestable de la littérature et avait donc abandonné l'imbuvable Des Esseintes dans un café du Trastevere.


samedi 1 janvier 2011

Comment gâcher son joyeux Noël en 3 points #3

1. Voir quelqu'un mourir en vrai.

2. Partir quand même à Wien et peu apprécier.

3. Apprendre qu'elle nous a quitté cette nuit.

4. Trouver que décidément  Wien n'est pas à la hauteur de sa réputation.

5. Perdre son guide de Wien dans le métro, avoir un appareil photo déchargé, et se dire que c'est un signe pour rentrer plus tôt que prévu, et puis de toute façon se rendre compte qu'en fait la réputation de Wien nous a toujours parue d'un goût douteux.

6. Etre enfin chez soi pour se reposer avant de repartir pour l'enterrement, s'endormir à 21 heures, mais se faire réveiller par les voisins qui font un feu d'artifice du 31, se rendormir difficilement et finalement téléphoner à la Rotes Kreuz à 8 heures du matin afin de trouver un médecin de garde pour son fils qui a une grosse angine.

7. Jurer de ne plus jamais participer aux festivités de fin d'année, mais de retourner à Wien quand même.

Et bonne année grand-mère.