samedi 4 octobre 2008

T'as un tabernac de beau p'tit body!



Voici l’image d’un couple improbable, car doublement mamelu, comme vous avez l’honneur.
photo802zn1Cette sculpture funéraire d’une facture peu fantaisiste cache en réalité le secret d’une romance burlesque et passionnée, mais ne comptez pas sur moi pour vous apprendre plus que nécessaire, non pas que je sois paresseuse (quelle idée saugrenue), disons plutôt, eh bien, respectueuse. Jetons donc avec éclat un voile pudique sur le délicat secret de leur intimité, et sur la flamme enamourée que l’on devine encore malgré la terne froideur de la pierre noire.
Ainsi, reprenons le fil de leurs nichons.
Le jeune homme à votre gauche, celui-là même qui porte une coiffure qui a connu son heure de gloire dans l’ex-Allemagne de l’Est, n’a pas toujours été l’époux à la lourde poitrine de sa jeune voisine gâtée par la nature, vivant sous la XVIII Dynastie du nouvel Empire (entre 1550 et 1069 a.C. rappelle-je). Non.
Pour commencer, il était plat comme une limande, ce qui est toujours fort courant pour les mâles dominants d’aujourd’hui. Vous allez apprendre comment, grâce à l’amour et au mariage intéressé, il s’est découvert de palpables capacités poitrinaires, dans la joie mais aussi, en fin de compte, dans la douleur.
Malgré une vulgaire formation de scribe, Geb (c’est son petit nom) a réussi à devenir secrétaire d’ambassade extraordinaire du pharaon Thoutmosis IV (vous pouvez vérifier). C’est ainsi qu’il a été amené, on ne sait trop de quelle façon, vous imaginez ce que c'est, les temps immémoriaux, à fréquenter l’intelligentsia québécoise de l’époque, qui lui apprit au cours de festoiements délétères, un nombre incalculables de sacres du pays, du type : tabarnac percé, hostie toastée, câline de binne, enfant de nénane Esti, jésus de plâtre, torbinouche.
Grâce à ce savoir exotique, il n’eut aucun mal à faire rire en lui assénant finement un « T’as un tabernac’ de beau petit body ! », et donc à séduire, la charmante Nekhbet, reine de la night et du décolleté en drapé mouillé à Louxor. Les femmes étaient peu regardantes à l’époque.
Héritière d’une dynastie de riches prêtres-médecins et propriétaire de vastes champs d’orge destiné au commerce et aux offrandes, elle avait aux yeux de Geb nombre d’atouts qu’espèrent toutes les personnes sensées : charme, nichons, pognon.
Bref, ils se marièrent et vécurent richement, comblés par les Dieux. Et c’est ainsi qu’il devint un paysan plus qu'aisé, aimant à ce point la boisson sacrée des Dieux, la bière Fayrouz (turquoise en arabe) que des mamelles somptueuses lui poussèrent après la cru du Nil de 1400 a.C. … Il en était tout content, et elle aussi, avouons-le. D’un autre côté, la piètre qualité de la bière lui refilait des maux de tête insensés le lendemain de ses sauvages beuveries, maux qui le poussèrent subitement à se donner la mort ; la douce Nekhbet le suivit dans ce choix douloureux, car elle ne pouvait imaginer vivre sans lui, sa peau, ses mains, ses seins.
Ne les jugeons pas.

lundi 16 juin 2008

Eve, ou le péché originel #3 (et fin)






Nous en étions restés, je crois, à l’expulsion du fameux verger tentateur.
Voilà donc Eve qui n’a plus que ses yeux pour pleurer, comme dirait ma maman, une femme de poigne.
Saul Rodriguez, le spécialiste guyanais de la Genèse  me disait  justement l’autre après-midi, d’un ton badin, que l’on pourrait considérer la  devise d’Amélie Mauresmo* « Comme on rate tout ce qu'on entreprend, l'inaction est finalement le meilleur gage de réussite »  comme celle de notre Eve déchue, terrassée, battue et sauvagement  humiliée sur le terrain d’un éternel bonheur qu’elle n’atteindrait finalement jamais.
eve_rodin_jardintuileries_terrasseoccidentaleVous constatez grâce à la vision pleine d’empathie de monsieur Rodin (ci à gauche) que contrairement à l’idée reçue (feuille de vigne et compagnie), c’est sur sa poitrine que, réalisant sa faute, elle se replierait honteusement, prenant conscience déjà qu’elle deviendrait ce symbole visible embarrassant sa vie et celle de ses filles (nous autres), sa féminité engendrant bien des souffrances étouffées et des humiliations inutiles, face aux mâles, d’instinct gloutons de supériorité facile.
De son côté, aveugle parmi les aveugles, l’homme condamné au dur labeur (je ne vous apprends rien si vous connaissez bien vos classiques) s’est dit qu’il n’y perdait pas tellement au change en fin de compte, et que ça occuperait toujours ses mains les jours de temps beau, torse poil et bottes en caoutchouc, de passer la tondeuse dans le jardin et d’arroser les plants de sauge.

De plus, se réjouissait-il, sa pudeur ne serait plus heurtée par la vision pour le moins scandaleuse de l’épais popotin de sa douce se trimballant de ci, de là  (à ce propos, on le sait peu, mais Adam confia plus tard, avec toute la classe qui le caractérise, qu’il était d’ailleurs temps pour Eve de se mettre aux pommes, parce que la tartiflette ça va bien cinq minutes).
Bafouées, en larmes, enfantant dans la douleur, abhorrant le femelle en elles,   élevées dans le mépris de leur genre et se désespérant pour les siècles des siècles d’être nées mamelues, c’est donc ainsi que commençait le départ de toutes les femmes dans l’histoire de l’humanité ?
Toutes ? Non ! une grotte peuplée d’irréductibles femmes, et fières d’être des femmes libres, résiste encore et toujours à l’oppresseur. Et  la vie n’est pas facile pour les hommes des camps retranchés…**
* devise mise en pratique au quotidien, de l'Open d'Australie qu'elle gagna avec panache grâce aux insolations terrassant ses concurrentes jusqu'à feu Roland Garros de cette année.
** Eh oui.

jeudi 12 juin 2008

Eve, ou le péché originel #2



La grande question, celle qui prime avant toute chose, c’est:
«  Pourquoi ? ».
michel_ange1Eh bien je vais vous répondre, tout à fait simplement : il faut bien s’émanciper, dans la vie !
Les filles de basse extraction ne naissent pas avec tous les atouts dans la main, ça ne date pas d‘hier, et jaillir tout droit de la côte de son mari n’est pas ce que je qualifierais de naissance prestigieuse.
Il a bien fallu alors qu’Eve développe une forme de stratégie de contournement pour se découvrir un peu d’autonomie à prix peu ruineux, se voyant tiraillée  entre soumission ou transgression, et comme chacun  sait, la liberté se conquiert, et se gagne, à la force du poignet.
La volonté de  défier le Père pris corps en la consommation de la pomme, délicate métaphore de l’orgasme, réel péché originel (le serpent comme substitut phallique, la sève, l’expulsion du jardin après qu’ils en aient suffisamment joui, oui, oui, la  prise de conscience de la différenciation sexuelle, pudeur, culpabilité, l’enfantement qui suivra, etc) dans lequel elle entraîne son compagnon de fortune, ou d’infortune c’est selon où l’on place ses priorités, et ses petites joies, dans la vie.
Soit.
Et après ?
Et après, rien !
Aujourd’hui, avec le recul bien sûr, je conseillerais à Eve et Adam de s’asseoir dans un coin, sur un petit talus recouvert de mousse, pour boire un verre de Porto et discuter un peu de tout ça. Seulement, essayez donc de théoriser pour réfréner le besoin de passion et d’ardeurs sentimentales chez une femme !
Et puis, que voulez-vous ? Ce qui est fait est fait.


(à suivre)


mercredi 4 juin 2008

Eve, ou le péché originel #1




hugovandergoeskunsthistoricUne divine légende nous apprend que nous  devons moult complications de la vie quotidienne (notamment au niveau agraire et médical) à une petite écervelée à l’appétit démesuré, qui n’a pas su, en son temps béni, se priver d’une pomme.
La malheureuse !
Je veux dire, un Brillat-Savarin affiné, admettons.
Une barre géante de Toblerone, passe encore.
Ou même un kiwi, une tomate, du raisin doux.
Mais une pomme !
C’est fade, ça manque un peu de fantaisie.
Et puis ça fait pauvre.
Faut-il qu’Eve fut bien désespérée pour ruiner sa vie et celles de ses descendants pour un fruit  sans doute un peu acide, à la chaire granuleuse et dont la peau épaisse se coince entre les dents. 
Comme je me targue d’être quelqu’un qui a un grand sens de la compassion à l’égard des malheurs d’autrui, je serais presque au bord de lui pardonner ce moment d’égarement.
De toute façon, je serai très claire: l’éternité, nue dans un potager, ce n’est pas une vie.
Ce qu’en revanche,  j’ai plus de mal à admettre, ce qui me heurte aujourd’hui et mériterait selon moi un bon coup de burin dans la gueule, c’est la réaction d’un Dieu ennemi qui  assène en dernier lieu, d’un air bravache et l’œil luisant, à la jeune  et craintive gourgandine, déjà suffisamment punie par la peine qu’elle a causée à son papa: 
« J'augmenterai la souffrance de tes grossesses, tu enfanteras avec douleur, et tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi. »  ...
(à suivre)








mardi 8 avril 2008

Lilith #3



Rester soi, c'est une grande force (Michelet)
lilth_johncollier
Nous en étions restés aux prémices du profond conflit sexuel opposant Adam, le premier mâle dominant de l’Histoire, et sa première épouse Lilith, la première ni pute ni soumise. Ca fait beaucoup de premiers, je sais, mais il s’agit de mettre en exergue le côté fondamentalement fondateur de ce mythe. Je me propose de vous rappeler en passant que toute cette histoire est absolument véridique, comme tout ce que je raconte par ailleurs.
Adam faisait donc une petite fixette sur la position dite du missionnaire, ce qui n’était pas du goût de sa belle. Une fois de temps en temps, d’accord, ou alors pour en finir, quand ça s’éternise inutilement ou que visiblement l’étincelle ne prend pas. Malgré tout, Lilith considéra très tôt que leurs rapports gagneraient vraiment à s’égayer, nécessitant une implication mutuelle dans une relation tendant à plus de fantaisie. Elle pensa baser leurs efforts sur une certaine diversification des postures, investigation des corps et découvertes des possibilités multiples qu’ils offrent au niveau du ressenti.
lady_Lilith
Exposant à sa moitié ce programme d’envergure au cours d’un dîner indien, composé principalement d’agneau sauce Madras, un plat bien relevé par un mélange de vingt-quatre épices, secret familial du chef, pour les amateurs de sensations fortes, elle se vit à nouveau opposer un net refus, sous le prétexte fallacieux qu’un homme ne saurait s’abaisser à se retrouver à la merci du pouvoir sexuel de sa femme. Est-il nécessaire de préciser que pourtant les godes-ceinture n’existaient pas encore, et qu’on ne lui suggérait, après tout, et pour parler pudiquement, qu’un léger retournement de situation à l’occasion. Rien de bien burlesque, en somme.
Pourtant, Adam n’admit ni compromis ni discussion.
Ni une, ni deux, Lilith mit les voiles: bord de mer, grotte sous-marine, exil pour l’éternité, séances de baise endiablées avec des créatures démoniaques entraînant pour la jeune jouvencelle une réputation certes foutue, mais assortie d’une découverte pour le moins jubilatoire, à savoir la stimulation clitoridienne en tant qu’alternative aux maux de tête.
Parallèlement, un aïeul d’Adam, assez connu pour avoir fait carrière sous le nom de Dieu le Père, un peu mâle dominant sur les bords lui aussi, lui refila alors un coup de main, histoire de l’aider à oublier cette femme sublime et arrogante n’en faisant jamais qu’à sa tête. Il lui fit jaillir des côtes une nouvelle petite amie, Eve, par essence destinée à ne pas moufter (hum hum, toussotement gêné), et l’assurance du patriarcat comme mode universel du fonctionnement de l’Humanité.
lilith_retro
Lilith fut rapidement oubliée, tantôt assimilée à une femme fatale poussant les couples à la faillite, tantôt à une sorcière lubrique mangeant les nourrissons et par là même un peu communiste, tantôt à un symbole féministe décadent et par là même un peu lesbien.
Elle reste une déesse-mère, justifiant l’égalité des femmes et des hommes.
Maîtresse femme indépendante et libre, toute jeune fille portant son nom (en deuxième position, faut pas exagérer) sera vouée à une belle vie, pleine d’assurance, d’intelligence, de fierté et de force.
Amen.












vendredi 4 avril 2008

Lilith #2



Ne pas faire de mal, c’est peu. Faire du bien, c’est tout.
lilith2Or donc, Lilith et Adam s’égayaient quotidiennement dans les prés originaux, la vie s’écoulant au mieux, selon toute apparence. Déjeuner frugal, promenade digestive, sieste réparatrice, discussions enjouées, le soir au coin du feu, sur l’inintérêt d’entretenir une meute de chiens ou de faire bâtir en lisière de forêt, alourdies parfois par des sujets plus graves, comme l’angoisse d’une France d’après sous l’égide d’un immigré hongrois  ultra-libéral, autoritaire, policier et sans doute complexé par la taille de son sexe.
Une vie simple, en somme.
Mais cette entente idéale connaissait malheureusement des limites, toujours difficiles à admettre, plus encore à  surmonter.
Le lieu favori des ébats amoureux du jeune couple se trouvait judicieusement installé sur la souche d’un pommier, dont le jeune homme, taillé dans la masse tel un athlète du bloc de l’Est, avait supprimé les rameaux et les feuillages afin d’y préparer, à proprement parler, leur nid d’amour. Cette initiative lui était venue en se souvenant vaguement d’une légende grecque, à propos d’un valeureux marin qui avait ainsi installé la couche de son épouse dont il était follement épris, une prénommée Pimprenelle, ou Philomène, sur un tronc d’olivier. L’idée lui semblait romantique, il affectionnait tout particulièrement les symboles littéraires.
Ainsi, c’est dans ce lit unique qu’Adam et Lilith se sont bibliquement connus. Ce fut assez décevant, mais bon, pour la première fois, ça arrive à tout le monde. Les deux amants convenaient parfaitement qu’il leur fallait du temps et  un peu plus d’expérience avant de se mieux comprendre, sensuellement parlant.
Cet apprêt du lieu, tout décoré de fleurs  de lilas et de muguet, les préférées de la jeune femme, attisait la malice de Lilith, qui après avoir consciencieusement initié Adam aux joies de la maîtrise de soi, souhaitait en découdre avec impudence, pétulance, astuce, et avouons-le, un peu d’obscénité. Rien de bien choquant, je vous arrête, mais un peu de changement entretient la flamme.
De ce fait, par une belle après-midi ensoleillée, car elle était plutôt de l’après-midi, Lilith, la première femme de la Création, tout en titillant avec habileté les tétons d’Adam, de son côté également premier homme de la Création, lui glissa, déjà toute à sa joie : « Aujourd’hui, je reste sur toi, chéri, tu vas voir, ça va être géant. ».
Adam, éberlué, exprime aussitôt son avis, oubliant ses tétons durcis et son corps frémissant : « Ah m…ais pas qu… qu… què… question, j…  j… je suis l’homme, j… je po… porte pénis et rè… rè… reste… d… dessus  toi, c’…. c’est à m… m…moi de te pé… pé… pénétrer, et par là donc de te dominer ». Vous voyez le genre. Il était bègue, aussi, j’avais oublié de le préciser, mais ceci explique peut-être cela, n’est-ce pas ?
(à suivre)


mercredi 2 avril 2008

Lilith #1



Maman, nous te devons tout, mais nous t’aimons, simplement parce que tu es maman.
lilithetadamCette histoire est méconnue, ce que je ne m’explique pas, car pourtant elle est source de tout.
Elle commence il y a bien longtemps, lors d’une matinée de septembre, identique à celle d’aujourd’hui, petite pluie fine, vent doux, nuages bas ; un jardin à l’anglaise, foisonnant, désordonné, irrégulier, une promenade libérée des contraintes, à l’image de la nature humaine ; un couple nu au cœur de cette luxuriance.
Lui est fringant, assez velu, et vierge : il s’appelle Adam. Il est naïf et influençable.
Elle est une ravissante personne au cœur tendre mais au tempérament passionné : son nom est Lilith. Elle porte haut les couleurs de son sexe (à savoir de beaux seins fiers et doux comme peau de pêche).
Ils ne se sont pas rencontrés sur les bancs de la fac, mais c’est tout comme. Ils sont les premiers êtres peuplant l’Eden (le premier district rural du monde chrétien), nés de la glaise d’un père divin qui les couve souvent d’un regard ému, quoique lubrique, du haut de son nimbostratus favori.
On croit souvent que dans les temps anciens, la vie à deux n’était pas encore marquée par les difficultés de communication. On a tort. En effet, Lilith et Adam, portés par une même foi pour l’amour éternel et l’intangibilité du lien matrimonial, en ont fait les frais (des difficultés de communication).
A SUIVRE...