samedi 23 décembre 2006

Menu de Noël #3 gérer maman


Vous qui êtes chanteur inaudible, blogueur culinaire ou enfant de Don Quichotte, projetant donc de passer votre soirée du 24 à boire des mojitos, de la liqueur de carambar ou du viandox dans une tente Décathlon sur les bords de Seine avec Jean Rochefort, vous savez donc d’ores et déjà que vous aurez la chance de passer votre matinée du 25 décembre au fond d’un bon lit moelleux ou dans un grand bain moussant Pierre Hermé parfumé au macaron Ispahan, afin de vous détendre après cette nuit de folie.
Mais moi qui suis une jeune femme dévouée et prête à supporter tous les sacrifices imposées par notre société judéo-chrétienne (quoique surtout chrétienne, pour le coup), je vais passer ma journée du 25, comme de bien entendu, à bruncher du foie gras dans mon salon.

Ainsi donc, Noël, se plier aux névroses de chacun.

bonhomme_de_neige_1Celle de maman n’est pas des moindres : c’est le bonheur d’être une famille unie.
Il va donc falloir faire semblant d’être heureux, et gais, car malgré une enfance triste, solitaire, pleine de secrets enfouis et de colères violentes, une vie de femme bafouée, de mère déçue et de sœur outragée, depuis qu'elle a identifié les transmissions psychiques qui circulent le long de son arbre (sa mémoire inconsciente), maman s’accroche à tout prix à l’idée que la famille, c’est comme l’humanité, c’est un trop-plein d’amour et de joie authentique.


Fort heureusement, nous allons devoir gérer cet aspect des choses (la famille unie) en comité restreint, car nous sommes quand même tous brouillés, qui avec un père, une fille, un frère, une sœur, un ex-mari ou l’énorme chien d’un beau-frère.

boireanoelVous m’objecterez que cela ne concerne pas vraiment le menu, mais si.

Pour donner à cette joyeuse fête un cachet de pimpance, le service d’alcool doit être continu, mais pas excessivement soutenu, c’est une sorte de juste maîtrise de l’ivresse, et c’est le travail de la maîtresse de maison (moi).

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Trop peu d’alcool, et nous finirons par jouer tous ensemble aux petits chevaux ou à Qui est-ce? avec mon fils, voire par faire la vaisselle. Et demander si y a pas Drucker à la télé.

Trop d’alcool, et maman et ma soeur finiront en larmes, après quelque vacherie assénée par moi, gloussant méchamment en tentant de m'endormir à même le tapis.

Mon frère se sera barré depuis longtemps, écoeuré par tant de gâchis de karma.

Mon chéri, qui est parfait, tentera de tenir une conversation cohérente avec Mamie Georgette sur sa jeunesse (« je gardais les vaches à onze ans tu sais, c’était pas cobbe aujourd’hui »), ses exploits sexuels (« et c’est là que l’abéricain, un bien bel hobbe, be dit que bes jambes, c’est un sacré padoraba ! eh ! okay d’accord, j’étais pas bal quand j’étais jeude») et ses choix politiques (« Dicolas Sarkozy, je suis sûre qu’il en-d-a ude toute petite, sidon, pourquoi qu’il ferait le béchant hispérite, hein ? »).

L'alcool justement dosé est la clé d'un repas de Noël à peu près supportable.

Soit pour 7 adultes consentants
, dont un musulman, un trinquant au lait froid uniquement et une qui a régulièrement de l’eau dans les poumons, disons que deux bouteilles de champagne et deux de Jurançon (pour le foie gras), ça suffira.
Prévoir en sus du Picon-bière et de l’acool de prune pour le beau-frère (celui du chien).

In fine, c’est Malou-la-pute, la thérapeute non conventionnée de maman, qui se réjouira bientôt, car le récit des festivités lui rapportera facilement à lui seul, comme chaque année, trois ou quatre séances, plus le paiement d'un nouveau stage de psychogénéalogie qui nettoiera sensément le passé du subconscient des descendantes femelles de la constellation familiale de maman.

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