mardi 8 avril 2008

Lilith #3



Rester soi, c'est une grande force (Michelet)
lilth_johncollier
Nous en étions restés aux prémices du profond conflit sexuel opposant Adam, le premier mâle dominant de l’Histoire, et sa première épouse Lilith, la première ni pute ni soumise. Ca fait beaucoup de premiers, je sais, mais il s’agit de mettre en exergue le côté fondamentalement fondateur de ce mythe. Je me propose de vous rappeler en passant que toute cette histoire est absolument véridique, comme tout ce que je raconte par ailleurs.
Adam faisait donc une petite fixette sur la position dite du missionnaire, ce qui n’était pas du goût de sa belle. Une fois de temps en temps, d’accord, ou alors pour en finir, quand ça s’éternise inutilement ou que visiblement l’étincelle ne prend pas. Malgré tout, Lilith considéra très tôt que leurs rapports gagneraient vraiment à s’égayer, nécessitant une implication mutuelle dans une relation tendant à plus de fantaisie. Elle pensa baser leurs efforts sur une certaine diversification des postures, investigation des corps et découvertes des possibilités multiples qu’ils offrent au niveau du ressenti.
lady_Lilith
Exposant à sa moitié ce programme d’envergure au cours d’un dîner indien, composé principalement d’agneau sauce Madras, un plat bien relevé par un mélange de vingt-quatre épices, secret familial du chef, pour les amateurs de sensations fortes, elle se vit à nouveau opposer un net refus, sous le prétexte fallacieux qu’un homme ne saurait s’abaisser à se retrouver à la merci du pouvoir sexuel de sa femme. Est-il nécessaire de préciser que pourtant les godes-ceinture n’existaient pas encore, et qu’on ne lui suggérait, après tout, et pour parler pudiquement, qu’un léger retournement de situation à l’occasion. Rien de bien burlesque, en somme.
Pourtant, Adam n’admit ni compromis ni discussion.
Ni une, ni deux, Lilith mit les voiles: bord de mer, grotte sous-marine, exil pour l’éternité, séances de baise endiablées avec des créatures démoniaques entraînant pour la jeune jouvencelle une réputation certes foutue, mais assortie d’une découverte pour le moins jubilatoire, à savoir la stimulation clitoridienne en tant qu’alternative aux maux de tête.
Parallèlement, un aïeul d’Adam, assez connu pour avoir fait carrière sous le nom de Dieu le Père, un peu mâle dominant sur les bords lui aussi, lui refila alors un coup de main, histoire de l’aider à oublier cette femme sublime et arrogante n’en faisant jamais qu’à sa tête. Il lui fit jaillir des côtes une nouvelle petite amie, Eve, par essence destinée à ne pas moufter (hum hum, toussotement gêné), et l’assurance du patriarcat comme mode universel du fonctionnement de l’Humanité.
lilith_retro
Lilith fut rapidement oubliée, tantôt assimilée à une femme fatale poussant les couples à la faillite, tantôt à une sorcière lubrique mangeant les nourrissons et par là même un peu communiste, tantôt à un symbole féministe décadent et par là même un peu lesbien.
Elle reste une déesse-mère, justifiant l’égalité des femmes et des hommes.
Maîtresse femme indépendante et libre, toute jeune fille portant son nom (en deuxième position, faut pas exagérer) sera vouée à une belle vie, pleine d’assurance, d’intelligence, de fierté et de force.
Amen.












vendredi 4 avril 2008

Lilith #2



Ne pas faire de mal, c’est peu. Faire du bien, c’est tout.
lilith2Or donc, Lilith et Adam s’égayaient quotidiennement dans les prés originaux, la vie s’écoulant au mieux, selon toute apparence. Déjeuner frugal, promenade digestive, sieste réparatrice, discussions enjouées, le soir au coin du feu, sur l’inintérêt d’entretenir une meute de chiens ou de faire bâtir en lisière de forêt, alourdies parfois par des sujets plus graves, comme l’angoisse d’une France d’après sous l’égide d’un immigré hongrois  ultra-libéral, autoritaire, policier et sans doute complexé par la taille de son sexe.
Une vie simple, en somme.
Mais cette entente idéale connaissait malheureusement des limites, toujours difficiles à admettre, plus encore à  surmonter.
Le lieu favori des ébats amoureux du jeune couple se trouvait judicieusement installé sur la souche d’un pommier, dont le jeune homme, taillé dans la masse tel un athlète du bloc de l’Est, avait supprimé les rameaux et les feuillages afin d’y préparer, à proprement parler, leur nid d’amour. Cette initiative lui était venue en se souvenant vaguement d’une légende grecque, à propos d’un valeureux marin qui avait ainsi installé la couche de son épouse dont il était follement épris, une prénommée Pimprenelle, ou Philomène, sur un tronc d’olivier. L’idée lui semblait romantique, il affectionnait tout particulièrement les symboles littéraires.
Ainsi, c’est dans ce lit unique qu’Adam et Lilith se sont bibliquement connus. Ce fut assez décevant, mais bon, pour la première fois, ça arrive à tout le monde. Les deux amants convenaient parfaitement qu’il leur fallait du temps et  un peu plus d’expérience avant de se mieux comprendre, sensuellement parlant.
Cet apprêt du lieu, tout décoré de fleurs  de lilas et de muguet, les préférées de la jeune femme, attisait la malice de Lilith, qui après avoir consciencieusement initié Adam aux joies de la maîtrise de soi, souhaitait en découdre avec impudence, pétulance, astuce, et avouons-le, un peu d’obscénité. Rien de bien choquant, je vous arrête, mais un peu de changement entretient la flamme.
De ce fait, par une belle après-midi ensoleillée, car elle était plutôt de l’après-midi, Lilith, la première femme de la Création, tout en titillant avec habileté les tétons d’Adam, de son côté également premier homme de la Création, lui glissa, déjà toute à sa joie : « Aujourd’hui, je reste sur toi, chéri, tu vas voir, ça va être géant. ».
Adam, éberlué, exprime aussitôt son avis, oubliant ses tétons durcis et son corps frémissant : « Ah m…ais pas qu… qu… què… question, j…  j… je suis l’homme, j… je po… porte pénis et rè… rè… reste… d… dessus  toi, c’…. c’est à m… m…moi de te pé… pé… pénétrer, et par là donc de te dominer ». Vous voyez le genre. Il était bègue, aussi, j’avais oublié de le préciser, mais ceci explique peut-être cela, n’est-ce pas ?
(à suivre)


mercredi 2 avril 2008

Lilith #1



Maman, nous te devons tout, mais nous t’aimons, simplement parce que tu es maman.
lilithetadamCette histoire est méconnue, ce que je ne m’explique pas, car pourtant elle est source de tout.
Elle commence il y a bien longtemps, lors d’une matinée de septembre, identique à celle d’aujourd’hui, petite pluie fine, vent doux, nuages bas ; un jardin à l’anglaise, foisonnant, désordonné, irrégulier, une promenade libérée des contraintes, à l’image de la nature humaine ; un couple nu au cœur de cette luxuriance.
Lui est fringant, assez velu, et vierge : il s’appelle Adam. Il est naïf et influençable.
Elle est une ravissante personne au cœur tendre mais au tempérament passionné : son nom est Lilith. Elle porte haut les couleurs de son sexe (à savoir de beaux seins fiers et doux comme peau de pêche).
Ils ne se sont pas rencontrés sur les bancs de la fac, mais c’est tout comme. Ils sont les premiers êtres peuplant l’Eden (le premier district rural du monde chrétien), nés de la glaise d’un père divin qui les couve souvent d’un regard ému, quoique lubrique, du haut de son nimbostratus favori.
On croit souvent que dans les temps anciens, la vie à deux n’était pas encore marquée par les difficultés de communication. On a tort. En effet, Lilith et Adam, portés par une même foi pour l’amour éternel et l’intangibilité du lien matrimonial, en ont fait les frais (des difficultés de communication).
A SUIVRE...